Les salariés bénéficiant d’une délégation de pouvoir de l’employeur ne peuvent pas être élus au comité social et économique, ni même voter aux élections. Encore faut-il que cette délégation de pouvoir soit réelle.
On ne peut pas être juge et partie ! Voilà pourquoi la jurisprudence a toujours décidé qu’un salarié ne peut pas, à la fois, détenir des pouvoirs d’employeur et exercer un mandat de représentant du personnel (lire par exemple les arrêts du 10 mars 2016 ou encore du 28 septembre 2017). Cette incompatibilité s’applique :
  • aux salariés détenant une délégation particulière d’autorité établie par écrit permettant de les assimiler à un chef d’entreprise ;
  • aux salariés qui représentent effectivement l’employeur devant les institutions représentatives du personnel de l’entreprise.
Encore faut-il que la délégation de pouvoirs soit réelle. S’il apparaît que le salarié qui en bénéficie n’a en réalité aucun pouvoir de décision, ce dernier ne peut être « assimilé au chef d’entreprise ». Le titulaire de la délégation de pouvoirs n’est alors qu’un salarié lambda et peut voter, se porter candidat et être élu au comité social et économique. Il en va de même pour le salarié du côté de l’employeur pour les réunions du CSE. S’il n’est là qu’en tant que collaborateur de l’employeur pour lui apporter un appui technique, on ne peut pas dire qu’il le représente. Il n’est alors qu’un salarié lambda disposant des mêmes droits électoraux que le reste du personnel. Illustration.

 

Une directrice, titulaire d’une délégation de pouvoir et aux côté de la DG aux réunions CE, est candidate au CSE
La directrice d’un établissement médico-éducatif décide de se porter candidate au second tour de l’élection du CSE. Elle y est élue suppléante pour le collège cadres. L’employeur demande alors au tribunal d’instance d’annuler la candidature et l’élection de l’intéressée. A l’appui de cette demande il fait valoir que la délégation de pouvoirs écrite signée par la salariée montre bien qu’elle est responsable de son personnel. La directrice a notamment la charge de « recruter le personnel nécessaire au bon fonctionnement de son établissement ou service », est responsable de la définition des tâches de tout le personnel et a le pouvoir d’initier une procédure disciplinaire en informant la directrice générale de toute mesure disciplinaire lui semblant opportune. De plus, la salariée participe en qualité de directrice d’établissement, dans la mesure où les questions à l’ordre du jour concernent son établissement ou service, aux réunions de comité d’entreprise ou de délégués du personnel avec la directrice générale.

 

Le pouvoir de direction est exclusivement entre les mains de la directrice générale
Arguments rejetés par les juges. Ces derniers observent que d’une part, si la salariée bénéficie d’une délégation de pouvoirs, elle doit toujours agir sous l’autorité de la direction générale et ne peut, par exemple, signer les contrats à durée indéterminée ou exercer le pouvoir disciplinaire. D’autre part, la directrice récemment élue au CSE ne peut représenter l’employeur devant les instances représentatives du personnel puisqu’elle a uniquement pour mission d’assister la directrice générale à ces réunions dans la mesure où les questions à l’ordre du jour concernent son établissement. Après cette appréciation concrète des fonctions réellement exercées par le directrice, il est conclu que son pouvoir de direction n’est pas suffisant pour annuler son mandat au comité social et économique.
Source – Actuel CE