Le code du travail n’impose pas à l’employeur de consulter le CE en liaison avec le CHSCT (ou le CSE) sur le cas individuel de chaque travailleur handicapé en vue de sa mise, remise et de son maintien au travail.

Le code du travail octroie aux instances représentatives du personnel plusieurs missions concernant les travailleurs handicapés. Mais quel est leur rôle en matière de remise ou de maintien au travail ? La Cour de cassation se prononce sur le sujet pour la première fois à notre connaissance.

Un travailleur handicapé apte à son poste sous conditions

Dans cette affaire, un chauffeur poids lourds, après un arrêt maladie de 3 ans, reprend son travail avec un statut de travailleur handicapé. A la suite de la visite médicale de reprise, il est déclaré apte à la reprise de son poste à temps partiel et sans port de charge lourde. Il est affecté à un poste à temps partiel, 5 heures par jour, de 4 heures à 9 heures du matin. Suite à deux nouvelles visites médicales à sa demande, il est déclaré apte à son poste à mi-temps avec contre indication de la manutention (pas de travail avant 6 heures du matin, travail sur 2 ou 3 jours).

Son employeur modifie son affectation. Le salarié est à nouveau placé en arrêt maladie et il envoie à son employeur un courrier par lequel il exerce son droit de retrait, en lui reprochant les modalités et l’organisation de son travail. Il demande au conseil des prud’hommes des dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité, ainsi que la résiliation judiciaire de son contrat de travail. Le salarié fait valoir que la violation de l’obligation de sécurité de résultat était caractérisée notamment par l’absence de consultation du CE et du CHSCT concernant les mesures prises pour faciliter sa remise et son maintien au travail. L’employeur rétorque notamment que les postes d’affectation avaient été validés par le médecin du travail.

Pas de consultation sur le cas individuel de chaque travailleur handicapé

La cour d’appel rejette les demandes du salarié et la Cour de cassation donne raison aux juges du fond. Elle explique que  les « articles L. 2323-30 et L. 4612-11 du code du travail, alors en vigueur, n’imposent pas à l’employeur de consulter le comité d’entreprise, en liaison avec le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, sur le cas individuel de chaque travailleur handicapé. »

En effet, ces articles précisent que :

  • le CHSCT « est consulté sur les mesures prises en vue de faciliter la mise, la remise ou le maintien au travail des accidentés du travail, des invalides de guerre, des invalides civils et des travailleurs handicapés, notamment sur l’aménagement des postes de travail » ;
  • le CE « est consulté, en liaison avec le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, sur les mesures prises en vue de faciliter la mise ou la remise au travail des accidentés du travail, des invalides de guerre et assimilés, des invalides civils, des travailleurs handicapés, notamment sur celles relatives à l’application de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés » (*).
Les IRP ont une compétence générale, pas un droit à être consulté sur chaque cas

Il s’agit donc d’une compétence générale, qui ne doit pas être négligée mais qui ne consiste pas en une consultation pour chaque cas individuel. Dans l’affaire ici, le salarié a bien été déclaré apte à son poste de travail. Ce n’est qu’en cas d’inaptitude que les représentants du personnel sont consultés sur les postes de reclassement. Le salarié ne fait d’ailleurs pas référence à cette obligation, mais la Cour de cassation clarifie ainsi la différence de situation concernant le rôle des institutions représentatives du personnel. Cette solution est pleinement transposable au CSE qui reprend les attributions du CE et du CHSCT dans les mêmes termes à l’article L. 2312-8, alinéa 5.

(*) Remarquons que la consultation prévue à l’ancien article L. 2323-30 du code du travail, en vigueur pour les faits de cette affaire, a été intégrée par la loi Rebsamen à la consultation annuelle sur la politique sociale à compter du 1er janvier 2016.

Source – Actuel CE