Si les accords collectifs portant reconnaissance d’une UES (unité économique et sociale) demeurent applicables, les stipulations de ces accords procédant à la détermination du nombre et du périmètre des établissements distincts pour les élections des membres élus des CE, des délégués du personnel ou des membres des CHSCT au sein de l’UES cessent de produire effet à compter de la date du premier tour des élections du CSE.

Quel est le sort d’un accord de reconnaissance d’une unité économique et sociale (UES) dans le cadre du remplacement des institutions représentatives du personnel (IRP) séparées par le CSE ? Cet arrêt en date du 25 mars 2020 répond à cette question et pose les règles applicables.

Même UES, nouveaux établissements distincts

En 2005, un accord reconnaît l’existence d’une UES entre 3 entreprises. Cet accord, parvenu à échéance, est renouvelé par un nouvel accord en 2010, reconductible. En outre, il est convenu que l’accord ne pourrait faire l’objet d’aucune dénonciation avant le terme de l’échéance, soit le 23 juillet 2020.

En 2018, une des entreprises de l’UES informe par lettre les syndicats qu’en application de l’ordonnance du 22 septembre 2017 relative au CSE, elle mettait en place à l’occasion du renouvellement des institutions représentatives du personnel au sein de l’UES un comité social et économique. Elle les invite à participer à la négociation du protocole préélectoral. Quelques jours plus tard, l’entreprise, en sa qualité d’entreprise la plus importante de l’UES, informe les syndicats de sa décision de fixer le nombre et le périmètre des établissements mis en place au sein de cette dernière. Il s’ensuit la conclusion d’un protocole préélectoral entre trois syndicats et les trois sociétés formant l’UES. Le second tour des élections se déroule le 19 février 2018, et le 1er mars, un syndicat demande au tribunal d’instance l’annulation du protocole préélectoral et des élections et de dire que les élections devaient se tenir dans le cadre du périmètre des trois sociétés défini par l’accord de 2010.

Le jugement déclare irrecevables les demandes du syndicat au motif que ce dernier n’avait pas, en temps utile, saisi l’autorité administrative d’un recours contre la décision de l’employeur ayant fixé le nombre et le périmètre des établissements distincts au sein de l’UES.

Caducité des stipulations relatives aux IRP à compter du premier tour des élections du CSE

Et la Cour de cassation est d’accord. Elle invoque l’article 9-VII de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative au CSE, et qui prévoit que les stipulations des accords relatives aux institutions représentatives du personnel cessent de produire effet à compter du premier tour des élections du CSE.

Il en résulte que :

  • les accords collectifs portant reconnaissance d’une UES, qui n’entrent pas à cet égard dans les prévisions de ce texte, demeurent applicables ;
  • les stipulations de ces accords qui ont procédé à la détermination du nombre et du périmètre des établissements distincts pour les élections des membres élus des comités d’établissements, des délégués du personnel ou des membres des CHSCT au sein de l’UES cessent de produire effet à compter de la date du premier tour des élections des membres de la délégation du personnel du CSE.

Et d’en déduire que c’est à bon droit que le tribunal d’instance a jugé qu’en l’absence d’accord, l’employeur avait pu fixer unilatéralement le nombre et le périmètre des établissements distincts.

En d’autres termes, l’accord relatif à la reconnaissance de l’UES demeure valable, mais ses stipulations relatives aux établissements distincts sont caduques au premier tour des élections du CSE. Cette caducité étant automatique de par l’effet de la loi, il était nécessaire de procéder à un nouveau découpage, lequel pouvait résulter d’une décision unilatérale de l’employeur en l’absence d’accord.

Contestation de la décision unilatérale de l’employeur devant la Direccte, pas de l’élection devant le tribunal d’instance

Puis la Cour de cassation rappelle les règles concernant la détermination des établissements distincts au sein d’une UES conformément à l’article R. 2313-4 du code du travail.

C’est bien l’un des employeurs mandaté par les autres qui prend une décision sur la détermination du nombre et du périmètre des établissements distincts en application de l’article L. 2313-8, il la porte à la connaissance de chaque organisation syndicale représentative dans l’UES et de chaque organisation syndicale ayant constitué une section syndicale dans l’UES, par tout moyen permettant de conférer date certaine à cette information.

Dans ce cadre, ces mêmes organisations syndicales (ou, le CSE en cas d’accord d’entreprise conclu au niveau de l’UES déterminant le nombre et le périmètre des établissements distincts) peuvent, dans le délai de 15 jours à compter de la date à laquelle ils en ont été informés, contester la décision de l’employeur devant le Direccte.

En l’absence de contestation dans le délai de 15 jours suivant notification de la décision unilatérale par laquelle l’un des employeurs mandaté a déterminé le nombre et le périmètre des établissements distincts au sein de l’UES, l’organisation syndicale est irrecevable à demander à ce titre l’annulation des élections professionnelles.

Rappelons qu’en l’absence de toute tentative de négociation, la décision unilatérale de l’employeur doit être annulée, sans que la Direccte n’ait à se prononcer sur le nombre et le périmètre des établissements distincts tant que des négociations n’auraient pas été préalablement engagées et qu’il est fait injonction à l’employeur d’ouvrir ces négociations (Cass. soc., 17 avr. 2019, n° 18-22.948). Cette question ne semble pas avoir été soulevée, la Cour de cassation ne se prononce donc pas sur ce point dans cette affaire.

Source – Actuel CSE