La loi du 5 septembre 2018 sur la liberté du choix de son avenir professionnel apporte des modifications au régime du contrat à durée déterminée et sécurise la pratique du CDI intérimaire.

Publiée au Journal officiel du 6 septembre, la loi sur la liberté du choix de son avenir professionnel réforme le système de formation professionnelle et d’assurance chômage. Elle modifie également des dispositions, que nous n’avions pas détaillées dans notre synthèse du 3 août dernier, relatives au contrat de travail : sécurisation du CDI intérimaire, assouplissement dans la gestion des CDD successifs et nouveaux dispositifs pour assurer l’insertion de personnes en difficulté.

Succession de CDD (article 53)

La loi Avenir professionnel introduit une souplesse en matière de gestion de CDD successifs. A titre expérimental, il est autorisé de conclure un seul contrat à durée déterminée ou un seul contrat de travail temporaire pour remplacer plusieurs salariés. Il sera possible de conclure un seul CDD ou un seul contrat de travail temporaire pour remplacer plusieurs salariés absents, successivement, ou sur deux mi-temps par exemple.

Cette expérimentation ne sera toutefois ouverte que dans des secteurs qui seront définis par décret. La période de l’expérimentation est fixée du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2020.

Attention : cette expérimentation ne pourra avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement à un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise, précise la loi.

Les effets restent pour l’heure incertains. La mesure est présentée comme un moyen de lutter contre la précarité et d’éviter des CDD trop courts. Afin de voir si l’objectif est atteint, la loi prévoit que le gouvernement remettra au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation avant le 1er juin 2021. Ce rapport devra évaluer en particulier, dans les secteurs déterminés par décret, les effets de l’expérimentation sur la fréquence de la conclusion des contrats à durée déterminée.

CDI intérimaire (article 116)

La loi Avenir professionnel intègre dans le code du travail le CDI intérimaire. L’expérimentation de ce type de contrat, introduite par la loi Rebsamen, arrive en effet à son terme le 31 décembre 2018. En outre, cette modification permet de sécuriser les CDI intérimaires conclus entre le 6 mars 2014 et le 19 août 2015.

La Cour de cassation a en effet décidé dans un arrêt du 12 juillet 2018 que les partenaires sociaux, en signant un accord sur le CDI intérimaire le 10 juillet 2013, avaient outrepassé leurs compétences. Ils avaient en effet créé un CDI intérimaire avant que la loi Rebsamen de 2015 n’autorise l’expérimentation. La mise en place d’une nouvelle catégorie de contrat de travail déroge aux règles « d’ordre public absolu » relatives au CDI et au contrat de mission, ont estimé les juges.

Le CDI intérimaire permet à une entreprise de travail temporaire de conclure avec le salarié un contrat à durée indéterminée pour l’exécution de missions successives.

Chaque mission donne lieu à :

  • la conclusion d’un contrat de mise à disposition entre l’entreprise de travail temporaire et le client utilisateur, dit « entreprise utilisatrice » ;
  • l’établissement, par l’entreprise de travail temporaire, d’une lettre de mission.

Le CDI intérimaire (CDII) reste régi par les dispositions du code du travail relatives au CDI, sous réserve de certaines dispositions particulières.

Le contrat peut prévoir des périodes sans exécution de mission. Ces périodes sont assimilées à du temps de travail effectif pour la détermination des droits à congés payés et pour l’ancienneté.

Le CDII doit être établi par écrit et comporter notamment les mentions suivantes :

  • l’identité des parties ;
  • le cas échéant, les conditions relatives à la durée du travail, notamment le travail de nuit ;
  • les horaires pendant lesquels le salarié doit être joignable pendant les périodes sans exécution de mission ;
  • le périmètre de mobilité dans lequel s’effectuent les missions, qui tient compte de la spécificité des emplois et de la nature des tâches à accomplir, dans le respect de la vie personnelle et familiale du salarié ;
  • la description des emplois correspondant aux qualifications du salarié ;
  • le cas échéant, la durée de la période d’essai ;
  • le montant de la rémunération mensuelle minimale garantie ;
  • l’obligation de remise au salarié d’une lettre de mission pour chacune des missions qu’il effectue.

Le CDII doit prévoir le versement d’une rémunération mensuelle minimale garantie au moins égale au produit du montant du Smic par le nombre d’heures correspondant à la durée légale hebdomadaire pour le mois considéré, compte tenu, le cas échéant, des rémunérations des missions versées au cours de cette période.

Les missions effectuées par le salarié lié par un contrat de travail à durée indéterminée avec l’entreprise de travail temporaire restent régies par les dispositions du code du travail relatives aux cas de recours, sous réserve des adaptations prévues, et à l’exception des dispositions relatives à la période d’essai, à l’indemnité compensatrice de congés payés pour chacune des missions, à la rupture anticipée du CDD, à l’indemnité de fin de mission, aux règles de succession des contrats.

Par dérogation à l’article L. 1251-12-1, la durée totale de la mission du salarié lié par un contrat à durée indéterminée avec l’entreprise de travail temporaire ne peut excéder 36 mois.

Pour déterminer la durée minimum de présence dans l’entreprise s’agissant des congés de formation pour les salariés de 25 ans et moins (article L.6322-63 du code du travail), il convient de totaliser les périodes durant lesquelles le salarié exécute ou non une mission lorsque ce dernier est lié à l’entreprise de travail temporaire par un contrat à durée indéterminée.

Pour apprécier les durées nécessaires pour être électeur et éligible aux élections professionnelles dans les entreprises de travail temporaire (article L.2314-20 du code du travail), il convient de totaliser les périodes durant lesquelles le salarié exécute ou non une mission lorsque ce dernier est lié à l’entreprise de travail temporaire par un contrat à durée indéterminée.

Travail à temps partagé en cas de difficulté d’insertion (article 115)

La loi Avenir professionnel ouvre la possibilité aux entrepreneurs de travail à temps partagé de proposer un contrat de travail à temps partagé aux fins d’employabilité aux personnes qui rencontrent des difficultés particulières d’insertion professionnelle. Ces dernières doivent être inscrites à Pôle emploi depuis au moins six mois, bénéficiaires de minima sociaux, handicapées ou âgées de plus de 50 ans ou de niveaux de formation V, V bis ou VI.

Le contrat de travail à temps partagé aux fins d’employabilité est un contrat à durée indéterminée. Pendant les périodes d’intermissions, le dernier salaire horaire de base est garanti au salarié. Ce dernier bénéficie par ailleurs, durant son temps de travail d’actions de formation prises en charge par l’entrepreneur de travail à temps partagé et sanctionnées par une certification professionnelle enregistrée au répertoire nationale des certifications professionnelles ou par l’acquisition d’un bloc de compétences.

En dehors des cas d’abondement du CPF prévus à l’article L.6323-14 du code du travail, il est prévu un abondement supplémentaire du CPF à hauteur de 500 euros par salarié à temps complet et par année de présence. L’abondement est calculé, lorsque le salarié n’a pas effectué une durée de travail à temps complet sur l’ensemble de l’année, à dure proportion du temps de travail effectué. L’employeur doit s’assurer de l’effectivité de la formation.

L’entrepreneur de travail à temps partagé doit communiquer à l’autorité administrative, tous les six mois, les contrats signés, les caractéristiques des personnes recrutées, les missions effectuées et les formations suivies ainsi que leur durée, le taux de sortie dans l’emploi et tout document permettant d’évaluer l’impact du dispositif en matière d’insertion professionnelle.

A noter : ces dispositions s’appliquent aux contrats conclus jusqu’au 31 décembre 2021. Le gouvernement devra remettre un rapport au Parlement, au plus tard le 31 décembre 2021, établi après concertation avec les partenaires sociaux et après avis de la Commission nationale de la négociation collective (CNNC) sur les conditions d’application de ce dispositif et sur son éventuelle pérennisation.

Expérimentation en matière d’insertion professionnelle (article 83)

La loi Avenir professionnel ouvre la possibilité à des personnes sans emploi, rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, d’exercer une activité professionnelle en bénéficiant d’un service de mise en relation avec des clients et d’un accompagnement réalisés par une entreprise d’insertion par le travail indépendant

Cette expérimentation d’une durée de trois ans débutera à compter de la publication du décret qui doit déterminer les modalités d’application de ce dispositif, notamment les règles relatives aux conventions conclues entre les entreprises d’insertion par le travail indépendant et l’État ainsi que celles relatives aux aides financières dont elles peuvent bénéficier.

Dans le cadre de cette expérimentation, l’État peut conclure des conventions avec des entreprises d’insertion par le travail indépendant prévoyant, le cas échéant, des aides financières.

Source – Actuel CE